Un Zeiss Ikon Super Nettel 1 bien fatigué
- latelierdejp
- 5 mars
- 6 min de lecture
Dernière mise à jour : 8 mars
Préambule.
Connaissez-vous la Loi de Murphy*, autrement appelée la loi de la vexation universelle ?
Eh oui, au lendemain de la Bourse de Villers-Bretonneux, je visite une brocante couverte à Ath et là je réussi à trouver cet Zeiss Ikon Super Nettel I à un prix dérisoire, ainsi que quelques autres pépites qui viendront sous peu sur le site.
Bon, il n’est pas parfait, mais c’est celui avec le f2,8 en formule Tessar, le plus convoité de la gamme.
Mais commençons par le début …
Un peu d’histoire.
En 1929, la Fondation Carl Zeiss fusionne les quatre sociétés les plus importantes d’Allemagne : Ernemann, Goerz, ICA et Contessa-Nettel. Ainsi nait Zeiss Ikon, qui propose deux branches, l’une optique et l’autre d’appareils photo.
Conséquences de cette fusion, toutes les entreprises qui faisaient de l’optique (comme Goerz) ont abandonné la fabrication et tous les appareils du groupe utilisaient des objectifs Carl Zeiss. De même, tous ceux qui fabriquaient leur obturateur les ont abandonnés car les nouveaux appareils utilisaient du Compur, à quelques exceptions près.
Ce nouveau groupe était parmi les plus importants du monde d’alors, qui produisait des boitiers en 35mm de haute qualité, comme le Contax, ou des folding (pliant) comme le Super Ikonta, ainsi que des caméras pour le cinéma et de l’optique médicale. Tous ces appareils et toutes ces optiques avaient une réputation de grande qualité, voire d’excellence.
Hélas, après la seconde guerre mondiale, le groupe sera divisé en deux : une en Allemagne de l’Ouest et l’autre à l’Est. Il y aura de nombreux litiges entre les deux parties notamment au sujet de la marque Zeiss. Toujours est-il qu’à l’Est, de nombreuses usines seront démantelées, les machines et le personnel étant prié de suivre … sans discuter. La société Kiev recevra une grande partie des équipements. En 1948, le Zeiss est-allemand sera nationalisé et finira dans le VEB Pentacon. L’Ouest n’eut pas beaucoup plus de succès car il cessera ses activités en 1972.
Il faudra attendre la réunification des deux Allemagnes pour que Carl Zeiss réintroduise le nom de Zeiss Ikon et présente, à la Photokina de 1974, un nouveau télémétrique, fabriqué par Cosina au Japon avec une monture Leica M (voir le Zeiss Ikon ZM). Les Contax G et G2 seront équipés eux de lentilles japonaises mais le boitier sera fabriqué en Allemagne.
Voilà pour l’histoire de la marque, venons-en à notre appareil, le Zeiss Ikon Super Nettel premier du nom.
Au début des années trente, il existait deux grands appareils photo rivaux : le Leica et le Contax. Tous deux des télémétriques, ils étaient pourtant très différents, je vous renvoie donc aux articles que j’ai déjà consacré à ces sacrés monstres (Kiev 4 = copie du Contax et Leica IIIf).
Ils avaient toutefois un point commun : un prix élevé et une mécanique de précision, robuste et faite pour durer.
Aussi, afin de ne pas perdre (trop) de part de marché, Contax va-t-il lancer un appareil plus abordable, qui reprendra quelques beaux restes à son grand frère.
Il ne sera pas produit très longtemps : sorti en 1934 il ne sera fabriqué que jusqu’en 1938 dans sa première mouture, qui changera déjà en 1936, avec la version toute chromée qui clôturera l’aventure du Super Nettel.
Que va-t-il emprunter au Contax ? Son obturateur métallique, en forme de rideau roulant ; l’avance du film ensuite ; le compteur de vues et finalement le bouton de rembobinage.
Pour le reste, il est plus compact, fermé, et aussi complexe, mécaniquement. L’Allemagne de l’époque aimait bien montrer son savoir-faire mécanique.
Présentation du Zeiss Ikon Super Nettel I.
Même si le soufflet est court, il s’agit bien d’un appareil pliant (ou folding) qui utilise du film 35mm (le 24×36).

Il sera proposé, comme souvent chez Zeiss Ikon, avec des optiques différentes, qui justifient des prix de vente plus ou moins élevés : le moins cher sera le Carl Zeiss Triotar 50mm ouvrant à f3,5 (1480fr de l’époque), puis le Tessar 50mm ouvrant à f3,5 (1585fr) et enfin le Tessar 50mm ouvrant à f2,8 (1760fr).

Tout en métal noir et cuir de la même couleur, il a de la classe, ouvert ou fermé. C’est un bel objet, aux coins arrondis pour une bonne prise en mains. Car le boitier est lourd, ce qui ajoute à sa stabilité.
On appuie sur le bouton au centre, devant la semelle dite froide pour accessoires, et l’abattant avant s’ouvre vers le bas. Pour moi c’est un bon point car j’avoue ne pas trop aimer les portes qui s’ouvrent à gauche ou à droite, la tenue en main est moins agréable. Ici, l’appareil peut reposer sur la main gauche, pour une meilleure stabilité. Et, petite remarque en passant, l’ensemble est d’une étonnante rigidité, qu’on ne retrouve pas toujours chez les pliants.
Pour le refermer, il suffit d’appuyer sur les deux poussoirs de part et d’autre des rails du soufflet et il se replie.
Le viseur, sur le dessus à gauche, porte deux ronds à l’arrière : un pour le viseur proprement dit (cadrage) et le second pour le télémètre.
Car c’est ici que se joue la spécificité de l’appareil, son télémètre est couplé à la visée : vous pouvez régler la distance avec la molette placée au dessus de l’objectif et vous voyez le patch carré orangé se déplacer, permettant une mise au point fine.

Si vous observez l’appareil de face pendant ce mouvement, vous verrez l’objectif tourner en même temps. C’est du travail d’horloger … sauf si, comme sur mon exemplaire, il est bloqué, nous y reviendrons.
Cependant, le télémètre est réglé pour le 50mm f2,8. Des accessoires optiques permettaient de travailler au grand angulaire, mais dans ce cas il fallait monter un viseur indépendant sur la griffe porte-accessoires qui est ici bien nommée.
A noter que cette griffe ne sert pas pour un flash quelconque, l’appareil n’était pas prévu pour en utiliser un (pas de prise PC, ni synchro).
A côté du viseur toujours, un gros bouton rond, qui sert uniquement pour le rembobinage du film. Notons que si le bouton est de bonne taille, il a la fâcheuse idée de se trouver très près dudit viseur et ça ne facilite pas la prise avec les doigts.

De l’autre côté, un autre gros bouton plus complexe : c’est celui pour le réglage des vitesses, de la pose B, de 1/5s au 1/1000s – en passant, c’est remarquable pour l’époque une telle vitesse – qu’il faut soulever pour engager celles-ci ; c’est aussi avec lui que vous ferez avancer le film d’une vue et qui bloquera le mécanisme pour éviter les doubles expositions involontaires ; enfin, au centre, avec une couronne pointue et un filetage pour un câble, le déclencheur proprement dit.

Entre la griffe et ce second bouton, une petite roue, celle du compteur de vue, qu’il faut régler manuellement car il ne revient pas (encore) à zéro tout seul.
Voilà, pour les commandes, c’est tout. Ah non, j’allais oublier le réglage des ouvertures, de f2,8 à f11, qui se commande via la bague autour de l’objectif.
Pour charger un film à l’intérieur, il suffit de tourner les 2 clés en dessous pour désolidariser tout le dos de l’appareil. Attention, il y a une bobine réceptrice amovible à l’intérieur car à l’origine il était prévu de mettre deux cartouches spéciales dedans : la première contenait le film et la seconde le recevait, sans devoir rembobiner car la pellicule rentrait dedans au fur et à mesure des prises de vue. Cette formule fut assez vite abandonnée et donc vous pouvez introduire dans la chambre une bobine moderne et accrocher l’amorce dans la bobine réceptrice. A la fin des prises de vue, vous appuierez sur le petit bouton qui se trouve derrière celui qui sert à l’armement et aux vitesses pour débrayer l’ensemble et permettre de rebobiner le film.
Avez-vous remarqué les 3 vis un peu proéminentes, autour de l’objectif ? Elles permettent de fixer un pare-soleil ou un filtre. Simple et efficace.

Que penser de cet appareil ?
Il a souffert le pauvre. Je ne sais quel iconoclaste l’a ainsi brutalisé mais je constate plusieurs choses :
le déclencheur ne déclenche plus
la roue du télémètre est bloquée
le réglage des ouvertures aussi
il semble qu’un élément qui devrait être caché par le cuir soit maintenant apparent
il a besoin d’un bon nettoyage
En résumé, j’ai du travail pour le remettre en état, ce que je vais essayer de faire grâce à quelques tutoriels que j’ai trouvé pour le démonter (voir dans les références entre autre). Ce serait dommage de ne rien tenter.
Il y aura donc une seconde partie à cet article, celle de la tentative de réparation.
Vidéos d’illustration.
Un peu de publicité d’époque par LA.
Des références .
https://www.qwant.com/?q=zeiss+ikon+super+nettel+1&client=plgn-firefox-sb&t=web, https://vintage-photo.nl/extravagant-zeiss-ikon-super-nettel/, https://elekm.net/pages/cameras/supernettel.htm, https://collectiblend.com/Cameras/Zeiss-Ikon/Super-Nettel-I-(536-24).html, https://www.dancuny.com/camera-collecting-blog/2024/8/14/zeiss-ikon-super-nettel en anglais ; https://www.collection-appareils.fr/x/html/appareil-12007-Zeiss%20Ikon_Super%20Nettel.html, en français ; https://ameblo.jp/nezumaqi/entry-12493338198.html, en japonais
*Loi de Murphy aussi appelée loi de l’emmerdement maximal peut-être vue de deux manières : humoristique d’abord mais surtout comme un principe de prévention des dangers en tout genre.
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